Financer l’avenir : une formule gagnante pour les cohortes étudiantes, le personnel et le secteur de l’enseignement postsecondaire public en Ontario

Une soumission de l’OPSEU/SEFPO à l’intention du Groupe d’experts

Le 12 mai 2023

L’OPSEU/SEFPO représente environ 45 000 travailleuses et travailleurs de l’enseignement postsecondaire dans les 24 collèges publics de l’Ontario et 16 universités et établissements postsecondaires publics. Il s’agit du personnel de la restauration, du corps professoral, des conseillères et conseillers, du personnel d’entretien, des spécialistes du soutien à l’enseignement, des instructrices et instructeurs, des technologues de l’information, des technologues de laboratoire, des conseillères et conseillers pour l’accessibilité et les étudiantes et étudiants étrangers, des consultantes et consultants en emploi, du personnel du bureau des admissions et inscriptions, du bureau de l’aide financière, des constables spéciaux et du personnel des services de sécurité, des bibliothécaires et bien d’autres encore.

Afin de faire entendre leurs voix auprès du Groupe d’experts, l’OPSEU/SEFPO a engagé un processus de consultation des travailleuses et travailleurs du secteur de l’enseignement postsecondaire. À la suite de ce processus, nous sommes en mesure de mettre en lumière l’expertise unique des travailleuses et travailleurs qui œuvrent actuellement en première ligne dans le secteur de l’enseignement postsecondaire public en Ontario et qui sont bien placés pour en comprendre les réalités.

Les universités et collèges publics de l’Ontario jouent un rôle essentiel dans l’économie de la province. Ils encouragent l’innovation et créent une population informée et engagée. Ce rôle essentiel exige une augmentation et la stabilité du financement de base du gouvernement, ainsi que des mécanismes solides pour assurer la qualité, comme l’engagement de créer des postes à temps plein pour le personnel scolaire et le personnel de soutien, et des structures de gouvernance collégiale.

En attendant avec intérêt le rapport final du Groupe d’experts, nous soumettons de bonne foi les réponses suivantes.

  1. Comment la méthode de financement du ministère des Collèges et Universités (« le MCU ») et les leviers connexes (y compris les subventions de fonctionnement à des fins spéciales, l’aide financière aux étudiantes et étudiants, le financement axé sur le rendement et les ententes de mandat stratégiques) pourraient-ils favoriser au mieux l’excellence des établissements? Il convient de tenir compte des points suivants :
  • Augmenter les offres de programmes qui sont pertinentes pour le marché du travail et qui correspondent aux besoins des employeurs et des collectivités locales.
  • Procurer suffisamment d’information sur le marché du travail pour aider les cohortes étudiantes à faire des choix éclairés pour réussir la transition vers le marché du travail.
  • Répondre aux besoins/choix des étudiantes et étudiants et dispenser une éducation de qualité

Allouer un financement de base stable aux universités et collèges publics de l’Ontario est le moteur nécessaire pour dispenser un enseignement d’excellence. En ayant des répercussions tant sur le travailleur et que sur l’apprenant, les tensions financières nuisent à l’excellence des établissements. Un établissement qui est accablé par les contraintes financières ne prend pas de risques. Une chercheuse qui passe son temps à chercher des aides financières ne peut pas innover. Un enseignant qui est employé de manière précaire n’est pas une source d’inspiration. Une travailleuse de soutien à temps partiel et sans avantages sociaux n’a pas d’autre choix que de chercher un autre emploi. Un responsable de l’entretien qui évolue dans un milieu de travail où il y a une pénurie de personnel ne peut pas créer un environnement sécuritaire pour l’apprentissage.

L’ensemble des établissements d’enseignement postsecondaire sont aux prises avec des contraintes financières depuis plus d’une décennie. Depuis l’exercice 2012/2013, les universités et collèges publics de l’Ontario ont subi des pertes de financement de 24 % et 28 % respectivement au titre de leurs subventions de fonctionnement. Les financements réguliers ont été remplacés par des financements de programmes à court terme et les subventions de fonctionnement des établissements ont été remplacées par des fonds qui sont octroyés à des programmes très spécifiques. En rétablissant ces subventions et en permettant aux universités et collèges publics d’innover et d’éduquer, le MCU sera le moteur de l’excellence des établissements.

La réduction des subventions de fonctionnement, qui assurent pourtant la stabilité et la prévisibilité à long terme, pour favoriser les financements des programmes à court terme, a entraîné une dépendance accrue à l’emploi précaire. Dans l’ensemble du secteur de l’enseignement postsecondaire public, plus de la moitié de tout le personnel est employé de façon précaire. La précarité, c’est l’absence d’avantages sociaux et de jours congé de maladie, le manque de reconnaissance au travail et des taux de roulement élevés. Selon une enquête qui a été menée auprès du personnel des collèges qui a été réalisée par les Centres de santé des travailleurs(ses) de l’Ontario (CSTO), nombre de membres du personnel (18,2 % des répondants à l’enquête) ont fait part de leur intention de quitter définitivement le secteur à cause de la précarité.

En outre, ils ont souligné les obligations professionnelles, les exigences émotionnelles du travail, le déséquilibre entre le travail et la vie personnelle, l’épuisement professionnel et des troubles du sommeil significativement plus élevés que la population générale. Cette situation est exacerbée par des environnements de travail néfastes (p. ex., manque de confiance, manque de soutien, manque de reconnaissance) qui touchent une grande partie du personnel. Ces facteurs, qui ont été identifiés par le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST), sont à la fois des facteurs de risque d’épuisement professionnel et psychosocial pour la santé et la sécurité en milieu de travail.

Dans l’ensemble du secteur postsecondaire, le personnel nous dit que des postes vacants ne sont pas comblés en temps opportun ou même jamais comblés à cause du gel de l’embauche et de la gestion des postes vacants. Cela a des conséquences sur la capacité des membres du personnel scolaire et du personnel en général à planifier des programmes significatifs et spécifiques, à soutenir les cohortes étudiantes, à assurer la sécurité et à contribuer aux communautés qu’ils servent.

L’autre menace à l’excellence des établissements et du secteur est la diminution ou l’absence de gouvernance collégiale, de liberté académique et de protection de la propriété intellectuelle. Ces fondements, qui sont des mécanismes internationalement reconnus, assurent la transparence, la reddition de comptes, l’innovation et, en fin de compte, l’excellence. Les membres du personnel qui élaborent, dispensent et soutiennent les programmes d’études ne peuvent être exclus des décisions scolaires. En fait, elles et ils devraient jouer un rôle de leadership dans la prise de ces décisions. L’excellence scolaire provient du travail des experts et du personnel qualifié qui élaborent et dispensent les contenus qui répondent le mieux aux besoins des cohortes étudiantes et de la communauté. Lorsque ces membres du personnel peuvent innover en jouissant de la liberté académique et en sachant que leur propriété intellectuelle est respectée, on libère le véritable potentiel de notre secteur postsecondaire public.

Les établissements postsecondaires ont des relations fréquentes avec les responsables locaux et régionaux et ils sont bien placés pour déterminer comment mieux répondre aux besoins locaux. Au lieu d’être soumis à un modèle de financement fondé sur le rendement qui ne représente pas le véritable mandat du système postsecondaire public de l’Ontario, les établissements postsecondaires devraient être pris en compte individuellement dans le cadre de leur entente de mandat stratégique afin qu’ils puissent adapter leurs objectifs en fonction des besoins spécifiques de leurs communautés. En mai 2023, le gouvernement progressiste conservateur du Manitoba a annoncé qu’il abandonnait son plan de mise en œuvre d’un modèle de financement axé sur le rendement après que les parties prenantes eurent mise en lumière les conséquences d’une telle démarche. Le fait de lier le financement à des paramètres tels que les taux d’obtention de diplôme, les revenus d’emploi des personnes diplômées, etc. réduit l’accès des étudiantes et étudiants à l’enseignement postsecondaire, avantage certains établissements et programmes par rapport à d’autres, et force les collèges publics et les universités à se focaliser sur certains domaines plutôt que d’avoir une perspective globale de leurs programmes.

Dans un système postsecondaire public correctement financé, les étudiantes et étudiants ont la possibilité de faire des choix non seulement pendant leurs études, mais également tout au long de leur carrière. En offrant des programmes d’études postsecondaires bien équilibrés, abordables et accessibles dans toute la province, on permet aux cohortes étudiantes d’acquérir des compétences transférables, une liberté de choix à long terme, et d’élargir leurs perspectives individuelles et professionnelles pour l’avenir.

  1. En tenant compte du contexte local, provincial, national et mondial dans lequel évoluent les établissements et des recommandations du Bureau de la vérificatrice générale de l’Ontario (BVGO), comment peut-on assurer la durabilité grâce à des pratiques financières saines, à l’amélioration continue et à une saine concurrence dans le secteur de l’enseignement postsecondaire? On devrait prendre en considération, entre autres :
  • Les mesures qui génèrent des revenus
  • Les mesures qui réduisent les coûts
  • Le cadre de gouvernance et de reddition de comptes des établissements pour assurer la continuité de la viabilité financière
  • La rémunération, l’attraction des talents et l’incitation aux gains de productivité
  • Les structures d’acquisition des titres de compétences et l’architecture des programmes

Les universités et collèges publics de l’Ontario se retrouvent en concurrence en raison du contexte provincial qui réduit les coûts des secteurs, notamment celui de l’éducation postsecondaire qui est au cœur de la compétence du gouvernement provincial. Alors qu’il y a des excédents croissants et une croissance économique saine, le Bureau de la responsabilité financière de l’Ontario a signalé un déficit d’investissement de 0,4 milliard de dollars dans le secteur postsecondaire. Et l’Ontario continue à avoir le financement par étudiant postsecondaire le plus faible de tout le Canada. Parce que la santé financière du secteur postsecondaire public ne peut être bâtie que sur des fondations saines, il incombe au gouvernement provincial de changer le contexte et de relancer l’enseignement postsecondaire public de l’Ontario.

Au-delà du financement direct, dans son Rapport spécial sur l’Université Laurentienne, la vérificatrice générale a souligné l’importance de la gouvernance collégiale et les avantages d’entretenir des solides relations avec les parties prenantes, y compris avec le corps professoral, le personnel et les syndicats étudiants. La gouvernance collégiale favorise la transparence, la reddition de comptes et la qualité des programmes, entre autres avantages.

Alors que la gouvernance collégiale est généralement bien établie, mais pas pleinement respectée, dans les universités publiques, les collèges publics de l’Ontario n’ont pas instauré ce modèle malgré tous les efforts des équipes de négociation successives. À cause du manque de gouvernance collégiale, le personnel scolaire peut être délibérément exclu des prises de décisions académiques. Le système des collèges publics bénéficierait en outre des dispositions relatives à la liberté académique et à la protection de la propriété intellectuelle qui permettraient de véritablement stimuler l’innovation. Si la durabilité et l’amélioration continue sont les objectifs ultimes, adopter et promouvoir pleinement la gouvernance collégiale, la liberté académique et la propriété intellectuelle dans l’ensemble du secteur postsecondaire public constituent une étape naturelle.

Franchir cette étape permettrait de s’assurer que chaque dollar public est dépensé pour éduquer et soutenir les cohortes étudiantes plutôt que pour générer des excédents sans avoir un plan transparent quant à leur utilisation. Depuis 2004, les collèges publics de l’Ontario ont accumulé collectivement plus de 2,9 milliards de dollars d’excédents.

Mais ces excédents ne sont pas dépensés pour instaurer de bons milieux de travail dans les universités et collèges publics de l’Ontario. La forte dépendance au travail précaire et à temps partiel n’est pas durable et entraîne un roulement élevé, qui est coûteux pour les établissements. On contribue à la viabilité financière à long terme en permettant au personnel d’avoir accès à la sécurité d’emploi, à un régime de retraite, aux avantages sociaux et à des jours de congé de maladie.

En ce qui concerne les structures d’acquisition des titres de compétences et l’architecture des programmes, les étudiantes et étudiants du système postsecondaire public de l’Ontario obtiennent des titres de compétences qui leur permettent d’embrasser la profession qu’ils ont choisie avec confiance. Dans son rapport sur les collèges privés, la vérificatrice générale de l’Ontario a fait remarquer que l’on ne peut pas en dire autant pour les diplômés du système privé. Le rapport indique que les étudiantes et étudiants commencent leur carrière sans avoir les compétences nécessaires à cause des programmes qui sont dépassés. Pour cette raison, certains doivent parfois quitter la profession qu’ils ont choisie ou acquérir des qualifications supplémentaires, ce qui aggrave leur fardeau financier. Pendant ce temps, sachant pertinemment que les établissements postsecondaires publics de l’Ontario jouissent d’une excellente réputation à l’échelle internationale, les collèges privés tirent profit des ententes P3 et des programmes des établissements publics de l’Ontario. Lorsque l’éducation est entièrement publique et n’est pas liée au profit, la première priorité est les étudiantes et étudiants, et leur réussite à long terme.

La réussite estudiantine dépend de plusieurs facteurs, mais le principe établi de longue date est l’équilibre entre le défi et le soutien. Un programme d’études postsecondaires stimulant, qui est élaboré, dispensé et développé par des membres qualifiés du personnel scolaire et du personnel en général, est un défi qui doit engager et inspirer les élèves; toutefois, ce défi doit être équilibré par un niveau approprié de soutien qui facilite le développement de l’autoefficacité et par un environnement sain qui stimule la curiosité intellectuelle et l’exploration. Un équilibre qui répond aux besoins particuliers des cohortes étudiantes et tient compte de leurs besoins d’apprentissage uniques.

Lorsqu’on déséquilibre un de ces piliers, on crée des problèmes de rétention et d’apprentissage. Par exemple, dans le système des collèges publics, les spécialistes du sujet élaborent des programmes d’études en ayant une bonne connaissance de l’environnement d’apprentissage et des soutiens disponibles. En cédant la propriété intellectuelle à un collège privé et en permettant à quelqu’un d’autre d’enseigner le contenu dans un environnement différent sans les soutiens appropriés, les programmes, qui sont par ailleurs excellents, deviennent trop difficiles ou, en raison du désengagement de l’instructeur, trop faciles pour les cohortes étudiantes. Un véritable apprentissage ne peut pas avoir lieu dans ces conditions.

  1. Quels sont les critères et les objectifs d’un cadre des droits de scolarité à long terme (CDS)? Comment le CDS peut-il répondre à la fois aux besoins des cohortes étudiantes et des établissements? Quelles autres mesures, en dehors des droits de scolarité, pourraient être utilisées pour résoudre les problèmes de coûts, d’abordabilité et d’accès des cohortes étudiantes?

Comme mentionné précédemment, un établissement ou un individu ne peut pas prospérer en situation de détresse financière. Les coupes persistantes dans le financement de base, les réductions législatives des droits de scolarité pour les cohortes étudiantes nationales et le gel continu des droits de scolarité sans augmentation stable du financement de base ont entraîné une situation où les collèges et universités publics de l’Ontario ont dû s’appuyer essentiellement sur les droits de scolarité des étudiantes et étudiants étrangers. Non seulement c’est insoutenable, comme la vérificatrice générale l’a souligné dans plusieurs rapports, mais c’est également contraire à l’éthique. En 2020-2021, alors que les étudiantes et étudiants étrangers représentaient seulement 30 % de la population des cohortes étudiantes au niveau postsecondaire, ils représentaient 68 % du total des revenus provenant des droits de scolarité.

Le modèle de financement actuel a des répercussions négatives sur les universités et collèges publics de l’Ontario, mais il a aussi des conséquences à long terme sur l’économie de la province. Les établissements étant aux prises avec un contexte de financement imprévisible, le coût des études postsecondaires de qualité a été reporté sur les étudiantes et étudiants. Et ces cohortes étudiantes terminent ensuite leurs études avec un niveau d’endettement croissant, ce qui a des effets négatifs à long terme sur l’économie en général. Nombre d’étudiantes et étudiants qui n’ont pas les moyens de payer leurs études postsecondaires ou qui ne peuvent pas se permettre de s’endetter peuvent choisir de renoncer définitivement. À cause de cela, on segmente davantage l’économie sociale de l’Ontario. Et on dit aux gens que les études collégiales ou universitaires sont réservées aux personnes qui ont les moyens de les payer. Il s’agit d’un problème que les réductions de nature performative des droits de scolarité, comme la réduction de 10 % des droits de scolarité de la province, ne peuvent pas résoudre. Nous devons commencer par rétablir un financement de base stable et veiller à ce que toutes les personnes qui souhaitent apprendre puissent avoir accès aux établissements postsecondaires publics de l’Ontario.

On ne pourra réaliser de véritables économies et garantir la liberté d’apprendre qu’en faisant en sorte que le secteur postsecondaire public soit entièrement accessible et correctement financé. Dans un tel système, les étudiantes et étudiants obtiendront leur diplôme après avoir suivi une formation complète dispensée par des spécialistes de la matière enseignée avec le soutien d’un personnel qualifié. Ils termineront leurs études en ayant des connaissances transférables et un bon sens critique qui leur seront bien utiles pour entrer dans le marché du travail avec confiance. Ils auront les capacités de démarrer une entreprise, de développer leurs intérêts et de prendre des risques professionnels sans être étouffés par une dette écrasante. Ils ne seront pas cantonnés à des domaines spécifiques ni à une situation d’emploi néfaste par nécessité. Ils pourront profiter des possibilités de développement personnel et contribuer à leurs communautés et à l’économie de diverses façons.

On sait que le rendement de chaque dollar investi dans l’enseignement postsecondaire est de 1,36 $. Dans cette optique, la meilleure façon de réduire les coûts, d’accroître l’accès des cohortes étudiantes et de protéger l’économie de l’Ontario est d’effectuer ces investissements et de réaliser ce rendement.

  1. Quels sont les changements à la méthode de financement qui pourraient favoriser une plus grande durabilité pour les établissements et les cohortes étudiantes du Nord, et appuyer l’excellence de l’éducation spécialisée des établissements du Nord? En plus des facteurs financiers, devrait-on prendre en compte des modèles novateurs institutionnels/de prestation?

Les établissements postsecondaires du Nord de l’Ontario offrent des environnements d’apprentissage uniques et spécifiques. Toutefois, cette région devrait, selon les projections démographiques de l’Ontario, connaître une perte nette de population en raison du départ des jeunes gens et des jeunes adultes et des niveaux plus bas de migration internationale. Bien que les établissements du Nord de l’Ontario, comme ceux du Sud de l’Ontario, aient besoin d’un financement de base stable, d’une gouvernance collégiale transparente, et de mesures de reddition de comptes qui sont fondées sur le mandat des universités et collèges publics plutôt que sur le rendement, ils ont besoin d’un soutien spécifique compte tenu des changements démographiques spécifiques à la région.

Les universités et collèges publics du Nord sont désavantagés parce que les jeunes quittent la région, comme l’a souligné le bureau de la vérificatrice générale de l’Ontario, et parce que les cohortes étudiantes étrangères sont plus susceptibles de fréquenter des établissements postsecondaires dans la région du Grand Toronto. Les établissements du Nord de l’Ontario ont été touchés de manière disproportionnée par la dépendance croissante du secteur à l’égard des droits de scolarité des cohortes étudiantes étrangères – une dépendance non viable. Et ils ont besoin d’investissements publics pendant que le secteur effectue la transition afin de rétablir les subventions de financement de base de la province.

Dans certains cas, les établissements du Nord sont tenus de consacrer leurs ressources à des partenariats avec des collèges privés peu réputés dans la région du Grand Toronto. Le seul partenariat que toute école postsecondaire publique du Nord, mais aussi de tout l’Ontario, devrait avoir à nouer, c’est avec le gouvernement provincial lui-même. C’est le seul partenariat qui peut procurer de réels avantages au secteur.

En plus d’être correctement financés, les établissements du Nord de l’Ontario doivent également être en mesure de donner aux populations locales et aux étudiantes et étudiants d’autres régions ou de l’étranger des bonnes raisons de faire leurs études dans le Nord. Pour ce faire, les cohortes étudiantes doivent avoir le même accès aux services publics dans le Nord que partout ailleurs dans la province, notamment l’accès aux soins de santé, aux transports, à Internet et à des logements abordables. Un Nord dynamique et prospère est une bonne chose non seulement pour les universités et collèges publics, mais également pour la province.

En ce qui concerne les modes novateurs de prestation des cours, les établissements postsecondaires publics du Nord de l’Ontario doivent pouvoir offrir des programmes en modes hybrides ou flexibles en ligne. Cependant, bien que l’on puisse dispenser une excellente éducation à distance et/ou en mode hybride, cela ne peut se faire au détriment de la qualité. Les membres qualifiés du personnel scolaire et du personnel en général doivent faire partie intégrante du développement des cours, de la prestation des cours et du soutien. Et les charges de travail et la propriété intellectuelle doivent être respectées. S’ils sont correctement suivis, les cours enseignés en mode virtuel et/ou hybride sont à la fois professionnels et enrichissants pour les apprenants. Ils ne doivent pas être un moyen d’économiser de l’argent, de contourner les conventions collectives ni de réduire la qualité.

  1. Comment assurer un système d’éducation en français financièrement viable pour les étudiantes et étudiants en FLS et francophones afin qu’ils aient accès à une gamme de programmes de qualité qui les préparent pour réussir leur carrière? Devrait-on tenir compte des modèles novateurs institutionnels/de prestation des cours? Les leviers de financement du ministère pourraient-ils être mieux employés/employés différemment?

La langue française a toujours été une partie importante de l’éducation publique en Ontario. Les cohortes étudiantes francophones ou qui apprennent le français comme langue supplémentaire doivent avoir accès à d’excellents programmes en langue française au niveau postsecondaire qui leur permettent d’élargir leurs horizons scolaires, professionnels et linguistiques. En offrant un large accès à des programmes publics de qualité, on permet aux élèves d’apprendre dans la langue de leur choix et dans la communauté de leur choix. Cela nécessite un financement public ciblé.

L’enseignement d’une langue exige l’immersion non seulement dans la langue elle-même, mais aussi dans la culture. Les communautés francophones de l’Ontario ont des cultures et des histoires riches et diverses qui doivent être respectées. Dans un modèle d’éducation entièrement public, une prestation pédagogique novatrice se doit d’introduire des pratiques reconnues, en personne, à distance et hybrides, afin d’offrir un enseignement en français de qualité optimale. Ces programmes publics doivent être élaborés, enseignés et appuyés par les membres qualifiés du personnel scolaire et du personnel en général qui sont conscients que la qualité est de la plus haute importance.

  1. Quel est le rôle des étudiantes et étudiants étrangers dans un secteur postsecondaire durable et prospère? Il faudrait tenir compte de la qualité globale de l’expérience des cohortes étudiantes, y compris du logement, et évaluer les avantages, les risques et les possibilités pour les établissements et la province.

Les étudiantes et étudiants étrangers contribuent de nombreuses façons à la viabilité et prospérité du secteur postsecondaire public; toutefois, on ne doit pas se servir d’eux pour combler l’écart laissé par l’érosion du financement public. La vérificatrice générale de l’Ontario a cité plusieurs établissements qui, en raison du manque de financement, ont augmenté les droits de scolarité des étudiantes et étudiants étrangers et accru leurs efforts de recrutement. Selon la vérificatrice générale de l’Ontario, alors que les étudiantes et étudiants étrangers représentaient 30 % des inscriptions dans les collèges publics en 2020-2021, leurs droits de scolarité représentaient 68 % des revenus provenant des droits de scolarité. Une source de revenus qui est très volatile. Au plus fort de la pandémie de COVID-19, les cohortes étudiantes de l’étranger n’ont pas pu s’inscrire à leurs programmes d’études et les universités et collèges publics ont souffert financièrement. Par le passé, il y avait déjà eu des problèmes similaires concernant des questions internationales.

La vérificatrice générale de l’Ontario a également mis en lumière les pratiques problématiques de recrutement des étudiantes et étudiants étrangers de certaines agences internationales tierces, qui ternissent la réputation du système collégial public de l’Ontario. On retrouve des tendances similaires dans le secteur des universités publiques, où les risques associés à leur forte dépendance à l’égard des droits de scolarité des cohortes étudiantes de l’étranger ont été cités comme l’une des sources de l’effondrement de l’Université Laurentienne. Dans un autre audit sur l’optimisation des ressources concernant quatre autres universités publiques, la vérificatrice générale de l’Ontario a souligné le manque de surveillance des agences tierces et des pratiques de recrutement et remis en question la réussite du programme.

S’il est vrai que les cohortes étudiantes de l’étranger ont de nouveau augmenté, on ne peut pas dire que les établissements soient préparés pour faire face aux changements. Des changements ont été apportés à la formule de financement et aux droits de scolarité sur une période relativement courte. Les universités et collèges publics n’ont pas eu les capacités pour s’adapter aux changements et se sont donc tournés vers le recrutement d’étudiantes et étudiants étrangers afin d’accroître leurs revenus. Au lieu de développer intentionnellement des programmes et des services et d’accepter ensuite les demandes d’inscription, on enclenche un cycle visant à recruter les étudiantes et étudiants étrangers, puis les écoles leur procurent les services dont ils ont besoin à leur arrivée. Pour dispenser une bonne éducation aux cohortes étudiantes internationales, on doit leur offrir les soutiens scolaires nécessaires et connexes aux études tout en veillant à ce que les autres besoins, tels que le logement, soient satisfaits.

Conclusion

L’OPSEU/SEFPO a une longue histoire avec le système postsecondaire public de l’Ontario. Nous avons signé notre première convention collective pour le personnel de soutien des collèges en 1968. Depuis plus de 50 ans, nous sommes en première ligne face à des développements difficiles. Concernant l’avenir de nos universités et collèges publics, nous encourageons le Groupe d’experts à être honnête et direct avec la population de l’Ontario au sujet des mesures à prendre pour atteindre les objectifs qui ont été fixés au secteur. Faisons en sorte que ce rapport marque le renouveau de l’éducation postsecondaire en Ontario et engage le système dans la bonne direction. Nous espérons un véritable partenariat entre le gouvernement provincial, le personnel et les cohortes étudiantes. Nous espérons une éducation publique de qualité, correctement financée sur la base de la collaboration, de la confiance et du respect. C’est l’avenir pour lequel nous travaillerons.

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