Bienvenue à Drummondville. Nous ne sommes pas dans la ville du même nom située à l'est de Montréal. Non, nous nous trouvons dans un endroit en Ontario, construit sur les recommandations d'un consultant/banquier qu'on a payé 1 500 $ par jour. Si l'on se fie à ce qui se passe à Drummondville, Ontario, ses conseils sont aussi utiles qu'ils l'avaient été en 2008 pour nous porter au bord du gouffre financier. Mais pour Drummond, c'est en forgeant que l'on devient forgeron.
Mais nous ne devrions peut-être pas blâmer le messager. Après tout, après des années dans la haute finance, il s’est fait extirper d'une retraite paisible pour nous sauver. Il est entré sur la scène juste avant les élections, alors que McGuinty cherchait une ruse pour écarter les finances de la province de l'écran radar du public. En le faisant, il disait : « Oublions le déficit financier! »
McGuinty a abandonné le cabinet du premier ministre sans lutte et cédé l'Ontario aux mains d'intérêts corporatifs. Et nous qui pensions que ça ne nous arriverait jamais. Selon lui, notre déficit provincial est un déficit démocratique, où les banquiers, plutôt que les élus, tirent les ficelles. C'est un peu ce qui s'est passé peu de temps après en Italie et en Grèce. Là-bas, on a remplacé les gouvernements démocratiquement élus par un Conseil d'administration nommé par les banques.
Il nous reste le résultat : les recommandations de la Commission Drummond et Drummondville.
À Drummondville, on supprime des postes d’enseignant et on ajoute des machines à sous. On ne s'attend certainement pas à ce que le riche paie sa juste part d'impôts. Au lieu de ça, c'est les classes moyenne et pauvre qui écopent, avec plus de taxes sur les vices, plus de péages, frais d'utilisation et frais d'autobus scolaire, et un accès limité aux soins de santé et chirurgies pour les femmes.
À Drummondville, les gens vivent dans un monde du tout ou rien, où le ciel leur tombe toujours sur la tête. Toute croissance économique future, aussi chétive qu'elle soit, est fondée sur la suppression d'emplois dans la fonction publique, parce que tout le monde sait que le secteur privé est un grand créateur d'emplois. Et le secteur privé ne peut investir dans les emplois qu'une fois que le gouvernement a réduit sa masse salariale en rognant son effectif. La prospérité par l'austérité, c'est ça?
À Drummondville, on n'autorise pas l'équilibre entre les secteurs public et privé. L'équilibre ne satisfait pas le scénario de crise de Drummond. À Drummondville, c'est une machine à sous chez chaque dépanneur et plus de magasins d'alcool. Et on ne peut pas se contenter de rapatrier les magasins de franchise que le gouvernement avait confié à des amis, il y quelques années, pour remplir les poches de leurs propriétaires. On parle ici de magasins privés, établis dans de grands centres pour faire concurrence aux magasins de la LCBO.
Les habitants de Drummondville ne savent pas que leur fonction publique est la moins chère et la plus efficace du Canada. Ils ignorent même que c'est Dwight Duncan, leur ministre des Finances, qui l'a dit. Malgré cela, peu de gens parlent d'augmenter les recettes du gouvernement pour soutenir les services. Au lieu de ça, la plupart des gens disent que les impôts sont un fardeau sur le système. Qu'il est préférable de faire payer les gens qui utilisent les services.
À Drummondville, que l'on gagne 10 000 $ ou 300 000 $ par année, on paie tous le même prix pour les services médicaux, les autobus scolaires et les autres services qu'on utilise. Les gens pensent que c'est juste parce que c'est un peu comme les frais de gestion de compte qu'ils paient à la banque.
Le système d'impôt est lui aussi différent. Au lieu que les riches paient plus d'impôts que les pauvres en proportion de leurs revenus, tout le monde paie le même pourcentage. Et les riches ont plus d'outils à leur ceinture pour déduire des coûts. On parle ici d'impôts égaux plutôt que d'équité fiscale. À Drummondville, on pense que ça permettra aux riches d’avoir plus d'argent pour investir dans les emplois.
Au lieu de nommer Drummond, le premier ministre de l'Ontario aurait pu examiner d'autres solutions. Il aurait par exemple pu ouvrir une discussion sur l'avenir financier de notre province avec les représentants du monde des affaires, de la main-d'œuvre et du gouvernement. D'égal à égal, ces trois secteurs auraient pu échanger des idées équilibrées et progressistes. C'est ce genre d'idées qu'il nous faut pour assurer notre prospérité dans l'avenir. Le SEFPO a tenté de le faire il y a quelques années en réunissant différents groupes à la Conférence Ontario 2020.
Mais au lieu de ça, McGuinty a cédé ses pouvoirs à un banquier. Cette action passera dans l'histoire comme un geste lâche et source de discorde.
Avec la publication du rapport de Drummond, l'Ontario doit composer avec ses conclusions imparfaites. Le phénomène que l'on appelle « prophétie auto-réalisatrice » nous dit que la course vers l'abîme est sur le point de commencer.
Quelqu'un doit changer le dialogue. Bienvenue au SEFPO. En partenariat avec la Commission sur la qualité des services publics et l'équité fiscale de la Fondation des services publics du Canada, nous avons traversé la province pour parler à de vrais Ontariens. Nous avons parlé à ceux et celles qui considèrent l'Ontario comme leur chez-soi; qui sont directement intéressés par la relance économique et qui estiment que l'Ontario peut redevenir le moteur économique du Canada.
Ces gens estiment que nous devons tous et toutes payer notre juste part. Ils sont prêts à faire des sacrifices. Ils veulent faire partie de la solution. Et ils ne resteront pas assis à rien faire pendant que notre province se transforme en un système vertical axé sur le privilège, comme celui que prône Drummond dans son approche du tout ou rien.
Les problèmes de l'Ontario viennent du libre-échange et de la globalisation. Loin de nous rendre la vie facile et de contribuer à notre prospérité, ces traités servent les intérêts des entreprises qui les soutiennent. Les syndicats ont hurlé que de telles mesures attireraient le mercantilisme et supplanteraient le bien collectif. Nos cris ont été étouffés par les médias privés, qui rarement présentent de telles vérités.
Les faits parlent d'eux-mêmes. L'écart entre les revenus s'est élargi au fur et à mesure que l'effectif des syndicats diminuait. Pourquoi? Plutôt que de confier nos richesses à quelques-uns, les syndicats veillent à ce que l'ensemble de la communauté en bénéficie. Toujours plus prospères, ces travailleurs syndiqués membres de la communauté contribuent à la croissance d'une classe moyenne plus florissante. Les syndicats créent la richesse communautaire. Ils font partie de la solution.
Les membres du SEFPO et leurs partenaires au sein de la communauté sont sur la bonne voie. L'opinion publique est à l'opposé des recommandations de Drummond. On peut encore éviter d’entrer dans l'impasse de Drummondville.
C'est le défi auquel nous faisons face. Il reste un travail énorme à faire. Après tout, c'est notre Ontario! Pas un Ontario en 3D (avec Don, Dalton et Dwight). Assurons-nous que le seul Drummondville qui existe au Canada soit cette petite ville à l'est de Montréal, au Québec.
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