Chères consœurs, chers confrères,
Ouvririez-vous une boutique dans un pays où vous pourriez vous faire décapiter pour avoir critiqué le roi?
Notre gouvernement provincial le ferait. Voilà presque un an que je demande à la première ministre de nous expliquer pourquoi le Collège Algonquin d'Ottawa exploite un campus en Arabie saoudite. Le royaume a un terrible bilan en matière de droits de la personne; il a souvent recours aux flagellations et exécutions pour étouffer les protestations.
L'Arabie saoudite est également tristement célèbre pour son sexisme : une femme risque la prison pour le simple fait d'avoir conduit une voiture. Comment un programme d'études exclusivement masculin du Collège Algonquin peut-il représenter les valeurs de l'Ontario? Devrions-nous refuser l'accès de l'éducation aux femmes?
Une autre question encore plus judicieuse : comment cela représente-t-il les valeurs de notre première ministre, une championne en matière de défense des droits des femmes?
J'estime que tout ça ressemble à de l'hypocrisie. Et ce n’est pas qu'à l'étranger.
Ici chez nous, Kathleen Wynne a refusé le financement de l'équité salariale à plus de 180 unités de négociation du SEFPO. Elle a fait en sorte que l'équité salariale soit un autre enjeu à négocier à la table de négociation.
C'est injuste. Un salaire égal pour un travail équivalent constitue un droit de la personne. En Ontario, c'est la loi, même si de nombreux employeurs ne versent pourtant pas les paiements au titre de l'équité salariale depuis des années.
À ce rythme, des centaines de milliers de femmes ne toucheront jamais l'argent qu'on leur doit. Elles auront pris leur retraite ou seront décédées avant.
Je ne remets pas en cause les références de Kathleen Wynne en tant que féministe, mais ses paroles ne se traduisent pas en actes concrets. Elle est très progressiste tant que ça ne coûte rien, mais quand il s'agit de rétablir l'égalité économique, elle est aux abonnés absents.
Pour Kathleen Wynne, il semblerait que l'austérité l'emporte sur les droits de la personne.
Si les collèges Algonquin, Centennial et Niagara font des affaires en Arabie saoudite, c'est parce qu'ils souffrent d'un sous-financement chronique chez nous. Les travailleuses de Ontario continuent à être sous-payées parce que Kathleen Wynne ne veut pas engager les fonds pour les payer.
Étonnamment, la première ministre fait preuve d'une grande tolérance à l'égard de l'inégalité économique. L'Ontario est plus riche que jamais, mais elle n'utilise pas notre richesse pour investir dans les services publics – eux qui contribuent pourtant le plus à réduire toutes les inégalités. Et elle ne l'utilise pas non plus pour aider les femmes à obtenir un traitement équitable dans le milieu de travail.
Le Collège Centennial annonce à présent qu'il quittera l'Arabie saoudite. C'est une bonne nouvelle. La pression de l'opinion publique a porté fruit.
Pour faire en sorte que la première ministre en tire une leçon, nous devons lui dire : « Ne vous contentez pas de seulement respecter les droits de la personne quand vous êtes piégée par la pression médiatique ». Dans l'Ontario que nous voulons, les droits de la personne doivent l'emporter sur l'austérité.
En solidarité,
Warren (Smokey) Thomas
Président, Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario
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